Un moment que je voulais te donner des nouvelles de la poule. Celle que le coq persécutait, qu’on avait mise en liberté, hors du parc.
Tu vas peut-être trouver ça étrange : il me semble que je te dois encore de ses nouvelles, qu’il s’agit d’une petite chose importante. Quelque chose qu’on a commencé, qu’il est bon de finir.
Elle s’est bien remise, blessures raccommodées, plumage superbe. Toujours flippée, mais de moins en moins. Et curieuse, comme toutes les poules, régulièrement en contact avec les autres (et le coq), au travers du grillage. Et pondant allègrement. Bon signe.
Un jour j’essaie de remettre tout le monde ensemble, le coq lui fonce dessus. Elle reste donc seule en territoire libre.
Elle dormait au pied d’un mur, abritée sous le buisson de sauge. Depuis quelques semaines avec le froid elle avait trouvé un meilleur endroit : dans un recoin contre le mur de la maison, au-dessus d’elle le chèvrefeuille au feuillage persistant : plus au chaud, plus protégée. On avait laissé faire. Elle rentrait se coucher vers 17h, nous tolérions alors qu’elle franchisse les grilles de la cour, tant pis pour les risques de fientes sur le passage. On se disait C’est l’hiver, on peut assouplir certaines règles.
Hier il semble qu’elle ne soit pas allée dormir contre la maison. (Ça arrivait parfois, quand la grille était fermée.) Pourtant la grille était entrouverte – j’en suis presque sûr.
Ce matin il y avait cinq six plumes, blanches, sous la sauge, puis dans l’herbe à côté. C’est tout. Discrets vestiges d’un animal qui quelques années a côtoyé nos jours, dont nous mangions les œufs. Les choses de la vie vont vite, parfois.
Laurent
PS : J’aurais pu, comme je l’ai pensé, te donner de ses nouvelles plus tôt. De bonnes nouvelles, alors. Tant pis : dans mes messages précédents j’ai préféré parler de choses humaines qui me préoccupent.
PS 2 : Debout devant l’évier de la cuisine, je regarde les montagnes. L’impression d’avoir fait ce que j’avais à faire. En tous cas ce que j’avais besoin de faire. Dans la cour, au premier plan (cette fois j’ai laissé la grille grande ouverte), elle apparaît. La blanche, dont je viens de raconter la disparition sous les crocs présumés d’un renard : elle est là, blanche, collerette noire, crête retombante, tout à fait vivante. Je me marre : l’histoire n’est pas finie.
lire des nouvelles de la poule 1 (août 21)
lire l’origine de cette histoire de poule (août 21)